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UN CŒUR VIRGINAL

Et il voyait, en une minute, tout un avenir se dérouler : « Ils demeuraient quai Voltaire et souvent, le matin, elle sortait avec lui, allant au Louvre des femmes. Il la conduisait jusque sous les arcades. Elle le reprenait pour aller déjeuner. D’autres jours, elle entrait à quatre heures dans son bureau, on allait, comme maintenant, manger des gâteaux, boire un verre d’eau glacée, et l’on revenait lentement par le Pont-Neuf et les quais ; on achetait quelque livre curieux, on regardait les jeux du soleil sur l’eau et dans les arbres ; le bateau les tentait quelquefois, ou le chemin de fer, ils gagnaient quelque bois, moins fou que celui de Robinvast, mais agréable encore, et Rose respirait un air presque aussi pur que son air natal… »

Il n’y avait pas beaucoup d’imagination dans ce rêve de M. Hervart, car il l’avait réalisé bien des fois. Mais d’y introduire Rose, cela en faisait une chose toute nouvelle, un plaisir encore inéprouvé.

« À la fin de mon séjour, je l’aimerai follement et je serai très malheureux, » se dit-il enfin.