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UN CŒUR VIRGINAL

sur ce gazon, où un magnolia venait de laisser tomber une de ses fleurs prodigieuses, il y coucha nue sa maîtresse… Son délire augmenta : il se mit à genoux et, penché sur la beauté impatiente de son amie, il la couvrait de baisers et des plus tendres adorations.

— Ce jardin me rend fou ! dit M. Hervart, à haute voix.

Le songe fut dissipé.

— Voici la tour, dit Rose, montons. Il y fera frais.

Elle aussi haletait, mais de malaise, et non d’amour.

Il faisait frais dans la tour.

En quelques instants, Rose, délivrée de son oppression, fut au sommet.

Elle avait bien senti que M. Hervart, absorbé par un songe, avait été loin d’elle, pendant toute la fin de cette promenade ; et Rose était fâchée. L’apparition de M. Hervart, un peu rouge, et les yeux égarés encore, n’était pas faite pour la rasséréner. Elle se sentait jalouse. Elle aurait voulu détruire l’objet de cette pensée.