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UN CŒUR VIRGINAL

de personne, de soi-même, moins que de tout autre. Que suis-je, aux mains du désir ? Et il faut qu’en même temps que les miens j’endorme les nerfs surexcités de cette petite ! Les nerfs ? Non, le sentiment. Mais le sentiment mène à tout… Que je suis ridicule avec mes dissertations intérieures ! Je me gâte de délicieuses minutes… »

Une maison comme toutes les autres, une porte cochère, une voûte : on est dans un grand jardin où se gonflent, parmi les palmiers, l’éclat et le parfum d’une flore exotique. Ils furent plus troublés encore que par les odeurs connues, les couleurs accoutumées du bois sauvage de Robinvast. Dans cette oasis paradoxale, l’air, maintenu immobile par la hauteur des murailles, était lourd et fiévreux. Des effluves presque charnels sortaient des fleurs en amour…

« … Quel alcôve pour des soirs de caresses !… » songea M. Hervart.

Il ne pensait pas à Rose ; son imagination appelait Gratienne, qui était voluptueuse. Il éteignit le soleil, alluma des globes lointains et doux, puis, ayant jeté des coussins de soie rouge