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UN CŒUR VIRGINAL

accommodait, encore qu’il jugeât un peu puérils ces épanchements manuels.

Il songea encore :

« Mais rien n’est puéril en amour… »

Ce mot, qu’il ne prononça pas, même intérieurement, mais qu’il vit, écrit comme de sa main sur une feuille de papier, ce mot l’épouvanta. Il abonda en protestations secrètes :

« Mais il ne s’agit pas d’amour. Elle ne m’aime pas. Je ne l’aime pas. C’est un jeu. L’enfant m’a rendu enfant comme elle… »

Il voulait ne plus penser, mais cela continuait :

« Jeu dangereux… Je n’aurais pas dû baiser ses yeux… Son front, passe encore, cela est paternel… La laisser s’appuyer sur mon épaule ? Comment faire ?… »

Il dut convenir ensuite que c’était lui le coupable. Sans y penser, poussé par son instinct d’homme, depuis son arrivée, depuis quinze jours, tout en continuant, d’apparence, à la traiter comme une enfant, il lui avait fait une cour muette. À chaque instant, il la regardait, lui sou-