Page:Gourmont - Un cœur virginal, 1907.djvu/237

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
231
UN CŒUR VIRGINAL

croyait mêlé aux autres papiers et qu’il n’avait pas retrouvé. Le vent l’avait emporté, peut-être » ?

« Non, cela serait trop direct. Qu’elle ait des soupçons, soit, je tâcherai de les détruire. Je serais perdu si elle avait des certitudes. Mais je suis bien tranquille. Elle y viendra d’elle-même, elle parlera. Et moi j’aurai l’air de ne pas comprendre, je me ferai arracher une à une des paroles ambiguës. »

Les jours passèrent. Rose, toujours dans la même attitude mélancolique, ruminait ses chagrins. Elle continuait de se taire, et Léonor voyait venir le moment où, sa présence étant inutile, il devrait prendre congé. Les travaux extérieurs s’achevaient, le mauvais temps rendait les terrassements impossibles et Rose avait décidé que les remaniements intérieurs seraient remis au printemps.

Léonor, cependant, commençait de souffrir à son tour. À vivre avec Rose, il avait senti s’accroître et s’affirmer en lui un amour d’abord assez chimérique. Rose, lors de leur première