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UN CŒUR VIRGINAL

M. des Boys avait donc pressé Léonor de venir achever ses travaux.

« Cela sera une distraction pour elle, avait-il pensé. Et puis, au fond, et malgré ma parole donnée, je suis de l’avis de ma femme, Léonor serait un mari bien plus favorable. Quoi ! Hervart la rendrait déjà malheureuse ? »

La lettre qu’il lisait en ce moment achevait de le troubler. Elle était de Bouret et Léonor y était beaucoup vanté. Bouret continuait :

« J’ai vu Hervart, que j’ai engagé également au mariage, mais pour des motifs différents. Quoi qu’il soit un peu plus jeune que nous, il est probablement plus près de la fin. Cette fin, mon ami, hélas ! nous la verrons l’un comme l’autre se dresser devant nous, si nous vivons encore quinze ans. Me comprends-tu ? Avec de la prudence et de la diplomatie, Hervart peut traîner encore longtemps et même retrouver des moments brillants, mais il a trop joué du beau violon que la nature lui a donné. Les cordes vont se casser les unes après les autres. Tant qu’il en reste une seule, un virtuose peut encore