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UN CŒUR VIRGINAL

Sa tendresse pourtant n’était pas diminuée. Léonor dut en convenir, en recevant d’un air contrit les baisers poignants d’Hortense. Il lui demanda pardon, il s’humilia, et elle fut heureuse, un instant, aux câlineries de son amant, mais elle disait encore tout bas :

« Ô mon rêve, mon beau rêve ! »

Après son départ, Léonor informa froidement la dame du logis qu’il ne reviendrait pas, puis, après s’être ennuyé longtemps dans une salle d’auberge, il regagna Barnavast. Une lettre l’attendait, qui le pressait encore. M. des Boys le priait, avec une sorte d’anxiété, de fixer le jour où on devait l’aller quérir.

Il aurait bien voulu, pourtant, donner quelques jours à la méditation. Il avait une question à résoudre : « M’aime-t-elle ? »

« Nous ne nous reverrons pas à Carentan, c’est décidé. D’ailleurs, c’était absurde. Quelle localité pour l’amour ! Sa défaillance fut de la répugnance pour le milieu. Cela prouve sa délicatesse. Et puis les femmes manquent d’imagination. À moi, tout est palais, la femme que