Page:Gourmont - Un cœur virginal, 1907.djvu/204

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
198
UN CŒUR VIRGINAL

savent d’instinct tout ce que nous prétendons leur apprendre.

— C’est cela, l’innocence.

— Peut-être. Mais un voluptueux délicat avec une jeune fille innocente et amoureuse est un homme perdu.

— Je commence à le comprendre.

— Il n’y a pas, reprit Bouret, plusieurs sortes d’amours. Il n’y en a qu’un. L’amour est physique. Le plus éthéré retentit dans l’organisme avec autant de certitude que le plus brutal. La nature ne connaît qu’une fin, la procréation, et si le chemin que vous prenez n’y conduit pas, elle vous arrête et vous condamne au moins à quelque simulacre : c’est sa vengeance. Tout sentiment intersexuel tend à l’amour, à moins que son caractère initial ne soit bien défini ou que les partenaires soient dans la phase de la vie où l’amour est impossible… Mais je vous traite trop en ami. J’abuse. Vous paraissez songeur. Vous ne vous intéressez pas autant à ces questions que Léonor Varin. C’est mon élève, en physique des mœurs. Comment va Lan-