Page:Gourmont - Un cœur virginal, 1907.djvu/189

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
183
UN CŒUR VIRGINAL

ché. Le moindre froid l’agrippait à la gorge ou aux articulations. Enfin, il respirait mal et des vertiges le prenaient dès que l’heure d’un repas se trouvait retardée.

« Je suis fou. Me voilà en train de me marier à l’âge où les hommes sages commencent à se démarier. Bah ! Je suis malgré tout solide et je puis encore dompter une femme ! »

Il se rappela avec fierté son dernier entretien avec Gratienne, qu’il avait vaincue, annihilée, réduite en bouillie, cependant qu’allègrement, faisant le coq, il chantonnait et caressait par de douces paroles son heureuse victime.

« D’ailleurs, avec Rose, je serai le maître. Je serai pour elle l’homme et les hommes… Tiens, pourquoi donc Gratienne ne m’a-t-elle pas écrit depuis que je suis ici ? Ah ! Ah ! Mais je ne lui ai pas donné mon adresse ! »

Il trouva d’abord que c’était bien ainsi, puis il se fit des reproches, eut presque des remords. Alors, il rédigea vite une lettre assez tendre, demandant des nouvelles. Il y avait une boîte aux lettres, non loin, sur la route de Saint-