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UN CŒUR VIRGINAL

« Non, se disait-il, en descendant l’avenue de l’Opéra, cette petite fille de Robinvast ne m’obsédera pas ainsi, heure par heure. N’importe quelle chair de femme, pourvu qu’elle agrée à mes sens, me délivrera de cette sotte vision. Y a-t-il de l’amour sans désir charnel ? Cela serait contraire à la vérité physiologique. Si j’aime Rose, c’est que je la désire… Si je la désire, c’est que j’ai des besoins physiques. Ces besoins rassasiés, je ne désirerai plus aucune femme, et je ne penserai plus à cette péronnelle. Qu’Hervart en fasse son plaisir, cela me sera parfaitement égal et, après tout, les satisfactions qu’il en tirera seront-elles si différentes de celles qu’une inconnue va me verser, avec tant de bonne volonté ? Quelques minauderies : est-ce un piment ? La sensation d’une victoire : la grâce vaut mieux. Trouverai-je la grâce ? Hélas ! non. Mais en y mettant le prix, on a des imitations parfaites. Ah ! que ne suis-je à Barnavast, à jauger des cubes de maçonnerie, avec l’entrevision des cuisses mafflues de Placide Gérard ? Maintenant, je sais ce qui va arriver… Le sait-on