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UN CŒUR VIRGINAL

— Dites votre compromis.

— Mais je ne connais pas encore le terrain.

— Oh ! Ce n’est pas grand. En un quart d’heure, vous aurez une idée de l’ensemble.

Léonor disserta encore un peu sur l’art des jardins, mais il sentait parfaitement qu’on ne l’écoutait pas. Enfin il dit :

— La nature doit obéir à l’homme ; mais l’homme raisonnable ne lui demande guère qu’une seule chose, se laisser admirer ou se laisser aimer. Ceux qui veulent admirer sont parfois enclins à lui imposer certains sacrifices. Ceux qui aiment sont moins difficiles et ils sont contents, pourvu qu’ils trouvent un accès facile vers les sites qui les charment. Mais je conçois que les femmes soient plus exigeantes. Il leur faut une nature plus douce, toute vaincue, des paysages où l’on voie la marque de leur puissance…

« Quelle singulière conversation, se disait Rose ! Voilà un architecte qui m’ennuierait bien, si je devais passer ma vie avec lui… »

Cette idée la fit songer plus particulièrement