1489, les barigels de Naples connaissaient déjà le moyen d’éviter ces abus de confiance par lesquels le condamné transmue son châtiment en un mauvais songe ; mais on le réservait aux prisonniers de marque. Guido della Preda, comte de Santa-Maria, était accusé d’avoir conspiré, les uns disaient contre la sûreté de l’Etat, les autres contre l’honneur de la reine. On ne l’avait pas pendu parce qu’il était gentilhomme ; on ne l’avait pas décapité, parce qu’il était innocent ; une peine spéciale lui avait été dévolue, car il faut bien faire une différence dans une geôle royale entre les prisonniers qui sont coupables et ceux qui ne le sont pas.
Il était au secret : la conscience de l’injustice subie aurait pu l’induire en des tentatives d’évasion ou de révolte et son intelligence en eût fait le chef nécessaire des gredins vautrés de compagnie sur la paille du commun cachot ; et il n’est pas bon qu’un prisonnier sorte de prison par la fenêtre ou qu’un geôlier soit étranglé dans une bagarre : c’est d’un très mauvais exemple et bien fait pour déconsidérer les prisons. Ce raffinement, privilège discuté et accordé en conseil d’État sur la prière du Saint-Office (car Della Preda était l’un des treize pairs du royaume) avait encore une autre raison : « Notre Guido est innocent selon les lois passagères, mais qui peut se vanter de l’être selon les lois éternelles ? Qu’il souffre donc d’avance le châtiment que Dieu lui réserve pour son début dans l’autre vie ! Qu’il souffre plus que les autres, puisqu’il est moins coupable ! Que chaque heure de sa vie mortelle soit un acheminement dou-