qui viendrait troubler ma royale indifférence et me cacher mon soleil, la mort ? je ne veux pas m’endormir à l’ombre de sa beauté. Aimer, à quoi bon, puisque le réveil est certain. Ah ! si l’éternité m’était donnée ! Indispensable éternité, sans toi la vie n’est qu’une bien méprisable passance. Est-ce que l’heure présente existe pour le condamné qui sait que l’heure suivante ne lui appartient pas ? Et cette vie est moins qu’une heure pour celui qui sait la valeur de ce qu’on lui a pris en lui volant l’éternité ». Comme il aurait sacrifié son génie pour être chrétien et non plus dilettante de christianisme, croyant, non pas à la beauté seule, à la vérité de la religion, assuré non seulement de sa nécessité sociale, mais de son immuable, absolue et solaire vérité !
Vers le Pont-Royal il sortit de ce nuage métaphysique, et retomba dans sa misère actuelle. La femme qu’il aimait ne l’aimait pas et ne l’aimerait jamais. Il avait beau se mépriser, s’accuser de sentimentaire impuissance, tout au fond de lui-même, l’homme protestait et redisait encore : « J’aime, puisque je souffre. »
Mais, chez Entragues, l’homme ne prononçait jamais le définitif aphorisme. Après les tumultuaires divagations de l’amoureux, le romancier venait, artiste ou fossoyeur, qui les recueillait, les attiffait de la verbalité, comme d’un linceul aux plis chatoyants et avec des soins, du respect, de la tendresse, les couchait dans le caveau sur la porte duquel des lettres d’or disaient : LITTÉRATURE.
Il se coucha, rêvant à l’embryon de roman qu’un