Page:Gourmont - Sixtine, 1923.djvu/282

Cette page n’a pas encore été corrigée


« Si tu ne veux pas boire la rosée que j’offre à tes lèvres dans le creux de ma main, quelque bête passera plus hardie ou plus sage qui se rafraîchira le cœur à ce breuvage d’amour.

Viens pendant qu’il est matin et pendant que l’animalité dort dans les bois !

Viens vagabonder dans les herbes mouillées : je secouerai sur tes cheveux blonds des pluies de perles et des neigées de diamants !

Viens et tu exulteras de joie, viens, la traîne de ta robe fera, parmi les mousses, un sillage de lumière et le soleil naissant baisera, dans sa candeur, le sourire de tes lèvres pourpres !

Viens, tu seras comme une reine au front blanc surgie d’entre les vertes ramures, et les papillons familiers se poseront sur tes oreilles.

Tu apprivoiseras la nature et à l’appel de ta bouche, mon âme, farouche comme un faon, bondira vers toi. »

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Les analyses et les dithyrambes formulaient le même esclavage. Il voulait rendre cette femme heureuse, voir ses yeux révulsés et ses lèvres, par l’oppression du spasme, entr’ouvertes. L’évocation, soudain s’accomplit, non pas, il est vrai, sous la forme visuelle directe, mais dans un lointain de songe vaporeux et voluptueux. Agenouillé près d’elle, après les suprêmes évolutions de l’étreinte, il la contemplait.

« Vraiment ma vie s’est transférée en cette femme