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dans la délicatesse de leur sensivité, — non pas à ceux qui s’y délectent, en hument sans dégoût la sordide purulence.

Il continuait à songer, sans écrire :

« Solange est assez beau garçon bien qu’un peu inculte, bien que vêtu à la grosse, bien que mal chaussé. Aux obligatoires fêtes d’un mariage, il rencontra une jeune fille qui s’éprit de lui, avec sagesse et réserve, mais sérieusement : elle le regardait, rougissait sous son regard quêteur de tares, baissait les yeux ; à passer près de lui elle sentait une inquiétude inconnue, comme la peur d’être arrêtée par son bras et la peur d’un salut banal. Naturellement la mère de la jeune fille se fit présenter Solange ; on lui demanda un service, un renseignement dont il devait sous peu, apporter la réponse, très adroit piège maternel. Il vint, il revint, toujours attiré par d’habiles combinaisons ; enfin, il revint pour son plaisir et se trouva enlacé avant d’avoir eu le temps de réfléchir. D’ailleurs, il ne pensait à rien, se laissait faire, dompté et captivé.

Ils se marièrent. Leurs médiocres fortunes réunies devinrent, entre les mains de l’intelligente jeune femme, une source d’honnête et presque luxueux confortable. L’appartement était vaste, clair et ensoleillé, les nourritures choisies ; au lieu de l’ennui présumé du lit unique, cette constante présence d’un être cher nuançait de rose et de bleu les heures jadis sombres des solitaires réveils.

Il n’avait plus le temps de mépriser les hommes, ni du savourer leur basse avidité ; les plaisirs d’amour,