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Pendant que Fortier essayait de la convaincre que la Revue Spéculative était indigne de ses mérites, que l’argent rare partout, avait une sorte d’effroi de sa caisse, etc., Moscowitch s’informait :

— Qu’est-ce que cette femme ?

— On l’appelle la marquise, je ne sais pourquoi. Ses monnaies lui ont valu d’autres noms : le Médaillier, celui-ci, plus cruel : le Reliquaire. Enfin, comme elle signe Françoise des recettes de cuisine dans un journal de mode, Renaudeau l’a dénommée Françoise-les-bas-bleus. Il est probable qu’elle a un nom réel, quelconque ou insignifiant.

— Dire qu’à mon âge, fit Renaudeau, je n’ai jamais vu de bas-bleus, les modistes les portent rouges, le plus souvent et c’est là que j’ai mes amours.

— Rouges ? Moi aussi, dit la marquise.

Elle campa son pied sur une chaise, releva sa jupe jusqu’à la jarretière.

La jambe était belle, encore, et la réponse spirituelle.

Renaudeau, s’avouant battu par le geste, se baissa et posa ses lèvres vers la cheville, avec un air qui voulait dire : je regrette de ne pas faire plus.

« Et moi aussi ! » répondirent les yeux de la marquise.

Ayant salué non sans une certaine grâce ironique, elle sortit sûre maintenant que son article passerait.

Fortier gronda son secrétaire : elle avait payé de sa personne, paiement reçu et signé, on ne pouvait plus refuser sa prose. Mais elle n’aurait pas d’argent.

— Renaudeau il faudra vous dévouer.