Page:Gourmont - Sixtine, 1923.djvu/147

Cette page n’a pas encore été corrigée

ses amis, Guido n’eut pas la naïveté, ni la méchanceté. Eh ! mais, cela devait aller loin : armer en course un navire, le dépêcher à de longues croisières sur les côtes barbaresques, nourrir d’assoiffantes salaisons les bandits enrôlés et de blanc-manger les captives beautés… Ah ! et voilà qu’il se souvenait : tous ses biens avaient été confisqués par la couronne ! Pas même un ducat dans ses chausses, ni une épée, ni un pistolet pour s’en procurer sur les grands chemins, et nu-tête comme un lazarone !

Il fallait pourvoir à cette pénurie.

L’office des douanes royales était ouvert et déserté de son surveillant qui buvait la rançon fiscale des Algériennes : il entra. Les insignes employés de Sa Majesté dormaient la plume à la main, comme il sied. Pousser une autre porte, même aperçu ; une troisième, c’était le trésor. Dans une très belle collection d’habits, de chausses, de manteaux, d’épées, de pistolets, de chapeaux français, il s’organisa un équipement assez galant, y joignit une notable superficie de dentelles d’Alençon, petit filet à femmes, avec quelque cordage pour la muette strangulation du gentilhomme caissier. Un peu plus loin, l’affaire de trois portes entre lesquelles se démenaient de beaux rêves, il le trouva. Son sommeil fut à peine troublé : un petit battement de mains, pas plus. Sans être très riche, le coffre royal était encore intéressant : il le fit passer dans ses poches, dénoua la corde, la remit à sa place, en passant et sortit.

Sur le seuil, le doganiere saluait :

— Votre Excellence daigne-t-elle être satisfaite.