Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér5, 1923.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maître), sont belles aussi, d’une frémissante sincérité. Le vieux cœur du poète se gonfle de sève et refleurit magnifiquement à ce nouveau printemps.

Bientôt, pour le guérir du doute amoureux, elle lui envoie son portrait : « Mon très doux cœur et ma très douce amour, je vous envoie mon image faite au vif aussi proprement qu’on la peut faire, pour vous conforter de ce que nous ne pouvons nous voir. » Lui, il mande à sa dame ses écrits nouveaux, la Fontaine amoureuse, le livre de Morpheus, des rondeaux, des chansons et ballades avec les airs notés, car il est aussi musicien, et la jeune fille est enchantée.

Ils se voient enfin, à Paris. Il vient, elle le fait asseoir, elle prend sa main, elle parle, il se met à trembler. Il ressent à la fois « ardure et froidure ». S’apercevant de son trouble, elle le mène au verger, et reprend la suite de son discours. Il est tendre, Guillaume est très ému. Quand elle dit :

Vesci mon cuer, si je povoie,
Par ma foy, je le metteroie
En vostre main pour l’emporter,

il pleure tendrement, et, plus émue à son tour qu’elle n’aurait voulu, elle lui fait la promesse de récompenser le mal qu’il endure et de doucement le guérir. Il revint ou plutôt elle le fit plusieurs fois que-