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CASANOVA


On parle, de temps à autre, d’une publication dont la maison Brockhaus, de Leipzig, aurait le projet. Il s’agit du texte authentique des Mémoires de Casanova. Cela réjouit quelques lettrés et tous les curieux. Souvenons-nous cependant d’une déception récente. Sans doute, il est heureux que nous possédions la correspondance complète de Stendhal, mais peut-être que ce bonheur n’est pas sans mélange, non plus que la grâce du nouveau texte. Ce qu’avait enlevé Mérimée valait-il la peine d’être rétabli ? La satisfaction de pouvoir lire quelques phrases libertines vaut-elle le sacrifice du plaisir littéraire ? Le document brutal est-il supérieur à la beauté ? Ces questions seront résolues différemment, selon les goûts ; et moi-même, tout en regrettant les deux rares petits tomes, je ne saurais plus les relire avec le plaisir d’antan ; je les délaisse pour le nouveau texte qui m’instruit davantage, tout en me donnant de moindres satisfactions esthétiques. Mais c’est la faute de l’époque présente, et je m’y résigne, d’autant plus que cela fera plaisir au mystérieux M. Paupe.