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STÉPHANE MALLARMÉ DEVANT LA CHRONIQUE


M. Henry Fouquier s’est annexé un journal qui n’avait pas encore, dans les temps historiques, subi sa prose. La conquête du Temps[1] porte à vingt-trois, dit-on, le nombre des chroniques hebdomadaires vomies par la gargouille de ce vieux Prud’homme marseillais. Cette triste polyurie s’inaugure ici par le bafouage du génie précieux et discret de Stéphane Mallarmé ; comme tous les chroniqueurs illustres, M. Fouquier a tenu à ouvrir pendant dix minutes, sur la tête du mort glorieux, le robinet de ses judicieux aphorismes. Car celui-là passe pour judicieux, parce qu’il est morne, parce qu’il n’a pas d’esprit, parce qu’il dit toujours la même chose dans toujours les mêmes phrases poncives. Lui aussi, paraît-il, est un représentant du bon sens français ; et mieux, il est un des piliers de ce tem-

  1. 1898. Je réimprime cette vieille et trop longue note, parce que le même acharnement poursuit toujours Stéphane Mallarmé. Si la bêtise désarmait, elle deviendrait l’esprit, ce qui est impossible.