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vantage par ma bouche que par vos yeux et par vos oreilles, si vous ignorez leur langue. Nous aurons le temps, en redescendant vers San Juan. Mais si vous y tenez, la semaine d’après, je vous conduirai au Chili par le sud, en suivant le rio de los Patos. C’est un territoire de chasse ; nous irons chercher des marchandises, au lieu d’en porter, et on pourra divaguer un peu à droite et à gauche de la piste…

— Quelle langue parlent-ils donc ?

— Une sorte de français.

— Mais je suis Français !

— Ah ! fit don José, c’est comme moi. D’origine s’entend ; car je suis né à Buenos-Aires. Mon père était basque et faisait le commerce.

Nous étions au sixième jour de marche ; la nuit venait, nous dressâmes les tentes, car les heures d’après le coucher du soleil devenaient déjà froides, ainsi que les matins.

Le lendemain, un parti d’Indiens nous inquiéta, mais le soir même, après quelques coups de fusil, nous étions à Santa Maria.

Notre conversation interrompue ne devait reprendre qu’au retour, hélas ! car les Aventurins s’amusaient. Les fêtes de l’automne venaient d’ouvrir ; le passage me fut refusé.

De toute la République Aventurine je ne vis qu’un poste de soldats. Armés d’arquebuses, coiffés de