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certain, cependant, qu’il en publia lui-même les premières versions ; plus tard, il s’en désintéressa.

On connaît, de 1532 à 1543, quarante-quatre éditions, soit de Pantagruel, soit de Gargantua. Le succès fut donc immédiat. Il augmenta encore à mesure que de nouveaux livres voyaient le jour. Outre les éditions avouées par Rabelais, il y a de très nombreuses contrefaçons. C’est vers 1548 que parut le Rabelais complet, sous la forme que nous connaissons. Après la mort de l’auteur, un imitateur habile rédigea un cinquième livre que l’on a l’habitude de joindre aux quatre premiers. M. Plan, partisan résolu de l’inauthenticité, se réserve de donner ses preuves dans un travail ultérieur. S’il fallait croire ce livre de Rabelais, ce serait d’un Rabelais en décadence et radotant : la valeur littéraire du cinquième livre est des plus médiocres. Il parut, près de dix ans après la mort de Rabelais, sous le titre de l’Isle sonante. Les contemporains éclairés ne semblent pas avoir été dupes de la supercherie, si l’on s’en rapporte au témoignage de Guyon, lequel écrit dans ses Diverses Leçons (1604), qu’il était à Paris quand ce livre fut publié et qu’il en connaît bien l’auteur, lequel n’était pas médecin. On peut noter aussi que la première édition du cinquième livre contient des passages empruntés au quatrième. Dès la seconde édition, le faussaire, sentant que