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mettre leurs instincts, leur sensibililé et peut-être même leur raison ; enseigner que toute activité doit être régie et limitée par des règles, qu’il y en a en politique comme en grammaire, dans la morale comme dans l’art ; accepter cette autorité universelle pour soi-même et, l’ayant accceptée, l’imposer aux autres : M. Brunetière trouvait tout cela dans le catholicisme, il fut catholique. A vrai dire, et malgré son accès de folle transformiste, il l’avait toujours été. On ne se convertit pas : on redevient ce que l’on était, au début de la vie, et ce que l’on est resté secrètement, malgré toutes les apparences. Le goût de M. Brunetière pour le dix-septième siècle classique était une indication : on ne converse pas quotidiennement avec Bossuet quand on n’a pas un certain goût, avéré ou latent, pour la vérité religieuse. Une autre indication aurait pu être fournie sur les tendances secrètes de M. Brunetière, par l’aversion qu’il manifesta presque toujours pour la littérature moderne. Même quand elle est médiocre, la littérature contemporaine a cet intérêt très grand d’être vivante, de refléter les tendances du moment, c’est-à-dire de ce qu’il y a de plus important pour nous, qui ne disposons que d’un moment de vie. Mais M. Brunetière a toujours aimé à vivre dans l’éternité et devant lui tous les moments étaient égaux,