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On dirait que cet ariicle ne vise que les femmes de chambre. Il serait parfaitement inepte, s’il n’avait pour but secret d’excuser l’homme dans tous les cas, sauf dans le cas même où l’adultère lui est à peu près impossible. A Paris, du moins, l’exiguité de nos logis s’oppose à la fantaisie visée par le Code. La loi, prise à la lettre, permettrait même au mari de recevoir chez lui, dans sa chambre même, la visite de sa maîtresse. C’est ridicule. Passons.

La seconde opinion ne voit à l’adultère de l’un ou l’autre conjoint indifféremment qu’une seule sanction logique, le divorce. On peut considérer l’adultère comme une faute morale ; ce n’est pas un fait antisocial. L’infidélité conjugale lèse un des époux ; elle ne lèse pas la société tout entière. Ce sont des affaires privées. Il ne faut pas confondre les actes immoraux et les délits. Les uns relèvent du Code ; les autres, de la conscience ou de l’opinion. Dès 1895, M. Viviani a déposé à la Chambre un projet de loi qui abolit ces articles du Code. En 1906, M. Paul Meunier est revenu à la charge, disant excellemment en son exposé des motifs : « L’adultère du mari comme de la femme ne peut avoir d’autre sanction que le divorce, la séparation de corps ou le pardon. » Il y a une troisième opinion, qui n’est pas ennemie de la répression pénale, mais qui voudrait assurer l’égalité, en ces matières,