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veuve Scarron, qui, du haut de son trône d’antichambre, promenait sur la cour et la ville son regard froid d’ennemie des hommes — et d’amie des femmes, disait la Palatine.

Quand Molière arriva à Paris, les dévots, depuis pmsieurs années déjà, se démenaient contre le théâtre. Le rituel du diocèse les excommuniait et les mettait sur le même pied que les usuriers, les femmes de mauvaise vie, les magiciens et les sorciers. Malgré la libérale Déclaration de 1641, les curés fanatiques, les Olier, les Vincent de Paul, les du Ferrier, avaient obtenu, dans la pratique, qu’ils seraient exclus de toutes dignités et charges publiques. Du Ferrier, dans son ardeur, ordonnait aux fidèles de brûler ces livres infâmes qu’on appelle comédies, romans, chansons. Surtout il défend de les vendre, « car, dit-il, iln’est pas permis de débiter des poisons ou des choses infectées ». Sous ces noms gracieux il englobe sans aucune distinction les plus grossières parades et le Cid ou Polyeucte. Tout ce qui est divertissement profane est infâme. Chaque curé, en même temps qu’il surveille les lectures de ses paroissiens, doit tenir un registre de tous ceux qui fréquentent la comédie, afin de pouvoir, au bon moment, les traiter comme ils le méritent, c’est-à-dire en excommuniés, ce qui correspondait, à peu de choses près, à la mort civile. Ce