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moins de quarante mille francs, et c’est le fruit de plusieurs pièces de théâtre, dont le succès, dû à la bienveillance du public, a été tel que telle de mes comédies a eu cent soixante représentations de suite. Qu’on lise les registres de tous les théâtres de France, et l’on verra qu’ils m’ont rendu plus de cent cinquante mille francs. Voilà ce qui peut m’en rester ; voilà le fruit de vingt-cinq années d’observations sur le cœur humain, de travail, de persécutions, de misère. » Il ajoute qu’il est loin de vivre dans le luxe, mais que, cependant, il aime ce qui est beau et ce qui est bon. Il peint, il dessine, il fait de la musique, il modèle, il grave, il est poète. Il a écrit dix-sept comédies en cinq ans. Ces arguments, d’ailleurs peu décisifs, ne touchèrent pas beaucoup Fouquier-Tinville et il dut se résigner à accompagner sur l’échafaud son ami Danton. Il furent exécutés le même jour. Ici se place une légende, dont je vais pouvoir prouver la véracité, au moins quant au fond. Au moment de gravir les marches de l’échafaud, dit un des historiens de Fabre d’Églantine, il aurait jeté au hasard, dans les groupes des spectateurs, quelques manuscrits, en criant d’une voix émue : « Mes amis, sauvez ma gloire ! » Plusieurs de ces pièces, ajoute M. d’Almeiras, furent recueillies par des curieux et l’une d’elles, l’Orange de Malte, tomba sous la main de