était de commande. Emprunter des passages entiers de Virgile ou de Sénèque, c’était enrichir la langue française. Tout en ignorant du Bellay, on suivait à la lettre ses conseils ingénus. Mais on imitait aussi ses devanciers immédiats. Corneille prend à la belle Sophonisbe de Mairet les imprécations de Camille ; Racine se souvient, dans Phèdre, de l’Hippolyte, de Gilbert, et, dans Athalie, du Triomphe de la Ligue, de Nérée. C’est à cette obscure tragédie qu’il emprunte le fameux « Je crains Dieu, cher Abner… », et les célèbres petits oiseaux auxquels Dieu donne leur pâture. Cette niaiserie du poète devenu dévot n’est pas plus ridicule dans Nérée que dans Racine elle y est même mieux à sa place et on regrette qu’elle n’y sommeille pas toujours.
Il semble que la tactique des emprunteurs volontaires soit de s’attaquer aux inconnus. Elle est adroite ; le profit est plus sûr et le danger bien moindre à voler les pauvres que les riches. Les emprunteurs involontaires s’adressent au contraire aux riches ; aussi cela ne leur profite guère, car la raison du plus fort est toujours la meilleure.
Baudelaire, métamorphosant le songe d’Athalie, a-t-il agi consciemment, a-t-il obéi à une réminis-