Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/80

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On pourrait, avec des restrictions, faire le même raisonnement, à propos des idées de Gobineau sur la race que l’on appelle aryenne. La supériorité du rameau humain qui a donné au monde les civilisations de l’Inde, de la Perse, de la Grèce, de Rome, de l’Europe moderne, n’est aucunement contestée. Au temps de Gobineau, cette notion de l’unité ethnique indo-européenne était encore assez vague. Il la précisa, tout en la restreignant. C’était son droit et, même en cela, il a devancé les données présentes de la science, car si l’on admet toujours l’unité linguistique originaire de ce vaste groupe, on est loin d’être d’accord sur l’unité ethnique. « À mesure, dit Gobineau, que les peuples se civilisent, s’agrandissent, deviennent plus puissants, leur sang se mélange et leurs instincts subissent des altérations graduelles. » C’est fort exact, et l’histoire des Romains, pour ne parler que de l’antiquité, justifierait seule cette déclaration. Gobineau donne comme exemple la race française, qui commença à décliner le jour qu’elle subit l’influence méridionale : pour lui, en effet, ce n’est pas l’élément latin, mais bien l’élément germanique (franc), qui a été le ferment de la civilisation française. Il dit fort nettement : « Là où l’élément germanique n’a jamais