Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LA PROSE DE MADAME DE NOAILLES


On peut, je pense, caractériser ainsi le romantisme prédominance du sentiment sur la raison. Les romantiques raisonneurs eux-mêmes, tels que Jean-Jacques Rousseau ou Michelet, n’échapperaient pas à cette définition. Elle laisserait sur la frontière un poète tel qu’Alfred de Vigny ; elle engloberait au contraire un philosophe qui, comme Théodore Jouffroy, laissa sa raison trembler au frémissement de ses nerfs.

Nous connûmes bien des sortes de romantiques. Il y en eut d’exaspérés, il y en eut de doux. La gamme descend de Victor Hugo à Gérard de Nerval. On n’en vit presque aucun, cependant, et pas même Alfred de Musset, abdiquer toute raison : le plus fou eut ses heures de sagesse, je veux dire des heures où l’intelligence reprenait le gouvernement de la sensibilité. Il n’y a qu’une exception : George Sand.