Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/272

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mesme ils disent de toy[1] que ton esprit malsain
S’extravague souvent au cours de son dessein ;
Que Garnier[2] sent le grain reclus, et que Porchère[3]
Mercenère au profit, met sa muse à l’enchère ;
Que Cygoignes[4], Regnier[5] et l’abbé de Tyron[6]
Firent à leur trespas comme le bon larron :
Ils se sont repentis, ne pouvans plus mal faire…
Disent que Malleville[7] avecque sa Clytie,
Divin, metamorphose une rose en hortie ;
Jappent après Racan, envient son renom ;
Trouvent son vers barbare autant comme son nom ;
Que Gombault[8] embrassant la façon d’Italie,
Par son Endimion a délaissé Thalie ;
Que Nasse[9] est un censeur et qu’il n’est satisfait,
Tant il est plein de vent, que de ce qu’il a fait.

  1. Théophile.
  2. Non pas sans doute Robert Garnier, mort depuis plus de trente ans, mais Claude Garnier, gentilhomme parisien, ami de Desportes et de Vauquelin des Yvetaux, auteur de : les Royales Couches (1624) ; l’Amour victorieux (1609) ; la Muse infortunée (1624), etc. Il fit de beaux vers d’une forte concision :
    Fléchirois-je aux corbeaux, avoué par les cygnes ?
  3. Non Porchère d’Arbaud, mais Laugier de Porchère, mort nonagénaire en 1653 ; ses vers se trouvent dans l’Académie des modernes François (1599) ; le Temple d’Apollon (1611) ; Cabinet des Muses (1619), etc.
  4. Sigognes, poète licencieux dont on trouve les vers dans Cabinet satyrique ; Délices satyriques (1620) ; Parnasse satyrique, etc. Mort en 1611, gouverneur de Dieppe.
  5. Mathurin Régnier.
  6. Desportes, abbé de Tyron.
  7. Claude Malleville, Parisien, mort en 1647. Ses poésies parurent en 1647, chez Courbé.
  8. Jean Ogier de Gombauld, poète huguenot, mort très âgé en 1666. Son Endymion, roman, est de 1624.
  9. Inconnu. Il y eut un Rasse des Neux, médecin et bibliophile, dont on sait quelques vers burlesques.