de talent, il n’y a plus, à proprement parler, d’architecture. On ne sort du banal que pour entrer dans le baroque, de l’imitation que pour s’engager dans l’absurde. On fait du grandiose ou du joli, du curieux et du bizarre, mais sans jamais atteindre la beauté. Pourquoi ? C’est que notre sensibilité n’est plus touchée par l’architecture. Cela nous intéresse encore ; cela ne nous émeut plus. Nous ne sommes plus disposés à faire pour l’architecture les sacrifices que firent nos pères. Le sens de l’architecture nous manque et son sentiment. D’autres sens et d’autres sentiments se sont développés en nous, étouffant celui-là. Il semble même que, si peu qu’il ait survécu, le sens de l’architecture soit devenu « réactionnaire », pour emprunter un mot au jargon politique ; on ne le trouve guère que parmi les fanatiques du passé, et notamment parmi le clergé et les moines. Depuis trente ans, les ordres religieux s’étaient fort enrichis en France ; on le savait et on croyait trouver, à leur dispersion, d’immenses biens de main-morte. Nullement : dernière incarnation de la sensibilité architecturale, les moines avaient construit de monumentales abbayes, de spacieuses églises, amas de pierres sans beauté et sans valeur. Les Bénédictins de
Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér2, 1913.djvu/171
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.