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destructeur de la vie même qu’elles prétendent glorifier. Elles ont un côté faible par où on peut les attaquer. Cherchons-le. C’est le côté sentimental. Le culte des morts et la philosophie qui s’en déduit naissent généralement dans un esprit à la suite de quelque déception grave. Ce que la vie refuse, ce qu’elle reprend, on le demande à la mort. Quand il rentre dans le passé, on descend aux enfers chercher le présent qui a fui de nos mains, et on s’enfonce dans les ténèbres à la poursuite de la lumière, on court dans les cimetières en quête de la vie.

Toute vérité n’est pas bonne à subir. Nous sommes les enfants du passé. C’est vrai, mais il vaut peut-être mieux l’oublier que de s’en souvenir trop. Quoi que nous fassions, nous répéterons jusqu’à notre dernier mouvement les gestes de nos ancêtres capitalisés en nous, dans notre système nerveux, cet accumulateur des énergies anciennes ; est-il bien nécessaire de nous pénétrer de cette fatalité, de charger nos épaules de ce fardeau ?

En continuant l’exposé de son idée, M. Barrès, par l’excès de son langage, la critique lui-même. Je cite encore tout un passage dont le commencement est exact :

« C’est peu dire que les morts pensent et par-