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mandées par les vieux auteurs : jardin de solitaire, encore plus que jardin de curé. Oa vivrait volontiers là, dans la paix et les parfums de la campagne. M. Huysmans, qui déteste la campagne, est venu y chercher autre chose que le repos : la prière. Il se lève à l’aurore, et même dans la nuit, pour aller entendre la messe, bravant le brouillard ou la neige. Entre les offices, il rêve parfois dans son jardin, puis il monte à sa chambre, et il écrit l’Oblat, travaillant ainsi, en même temps à son salut et à sa réputation littéraire.

Rien ne fait mieux comprendre, peut-être, que les romans de M. Huysmans et, en particulier, cet Oblat, qu’en art, ce qui importe, ce n’est pas le fond, mais la forme. Ce roman est vide à un degré inexprimable, dénué même de cette vague poésie religieuse que l’on sentait dans En route, et cependant il est possible, avec un peu de courage, de le lire intégralement. C’est que toute sa valeur est dans la personnalité de l’auteur qui s’est représenté exactement lui-même, avec toutes ses bizarreries, tous ses préjugés. L’Oblat, ce sont des choses mortes, un instant ressuscitées par la thaumaturgie d’un style très vivant. Je ne sais si les intentions apologétiques de M. Huysmans se sont réalisées, si