Page:Gourmont - Promenades littéraires, sér1, 1922.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

construire aucun raisonnement général ; les exceptions se traitent à part, avec un soin particulier, et, quand on sait manier les outils de la logique, on (init bien par les faire rentrer dans la règle. Au fond, Flaubert était, comme Chateaubriand, un poète qui écrivait en prose, et les Goncourt étaient des peintres qui se sont trompés sur leur vocation véritable. Il reste que les romans bien écrits sont presque toujours l’œuvre d’un poète avoué ou caché, et que les romans des écrivains purement prosateurs n’ont, le plus souvent, qu’une médiocre valeur littéraire.

Le roman prend son origine dans le poème. L’Iliade, l’Énéide sont des romans en vers, comme les Martyrs ou Salammbô sont des poèmes en prose. En somme, il n’y a qu’un seul genre, en littérature, le poème. Tout ce qui n’est pas poème n’est rien du tout, ou bien rentre, ce qui est loin d’être un déshonneur, dans cette vaste catégorie, la science.

C’est dans la science qu’il faut placer les romans de Balzac ; ce sont des études de psychologie. Les romans de Victor Hugo, au contraire, sont des poèmes, et c’est tout leur mérite, car, au point de vue psychologique, personne n’en conteste la