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convaincre que bien penser et bien écrire, c’est un seul et même mouvement qui met en marche deux activités solidaires.

II

Je suis donc d’accord avec M. Brunetière quand il nous donne ses motifs d’aimer le style de Renan ; mais c’est précisément parce que ces mêmes motifs, ou des motifs analogues, m’inclinent très souvent à aimer sa pensée. Cette pensée, assurément, n’est pas dogmatique ; et c’est encore ce qui me charme, et c’est aussi ce qui désole M. Brunetière. « Il n’arrivait à l’affirmation, nous dit-il, quand y il arrivait, qu’à travers un dédale infiniment compliqué de négations, de contradictions, d’hésitations et de doutes. » Ce n’est pas ainsi, selon le sévère critique, que l’on doit procéder. Il y a une vérité : on la cherche, on la trouve, on l’affirme. Souvent même, et le plus souvent, on n’a pas besoin de la chercher, on la reçoit toute faite, en cadeau, d’une main amie, et c’est bien plus commode ; cela permet de passer à la contempler les précieuses années qu’on eût perdues à sa recherche. M. Brunetière démontre