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çaise, devraient venir à Paris, dès qu’ils sentent la vocation. Ainsi faisaient les Romains : ils venaient à Rome.

C’est à sa naissance, à son éducation, à sa culture, que M. Verhaeren doit les défauts qui nous choquent ; ils ne lui sont pas personnels, et c’est pourquoi ils ne diminuent que fort peu l’admiration qui est due à son génie tumultueux.

Pour apprécier justement M. Verhaeren, il faut renoncer à le considérer du point de vue français, à le comparer avec les poètes de notre race et de notre tradition. Remettons-le dans son milieu, et qu’il ne soit plus pour nous qu’un poète flamand qui se sert, pour traduire ses émotions flamandes, de la langue française.

Nous voilà, du même coup, devenus indulgents pour beaucoup d’erreurs qui froissaient notre sensibilité. Il ne sera plus question ni de mauvais goût, ni de naïveté, ni d’obscurité : ces défauts vont peut-être devenir, chez ce Flamand, les conditions même de son originalité. Il sera intéressant de trouver dans M. Verhaeren une sorte de poésie dont précisément serait incapable un poète venu de la Lorraine ou de la Normandie.

Ce qui semble caractériser l’esprit flamand, c’est