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tionnel, et bientôt ils ne jouent plus du tout. L’enfance ne survit pas dans la maturité des animaux. On exhibe parfois un singe anthropoïde qui donne vaguement l’impression de quelque chose d’humain. Elles ressemblent à des vieillards, ces bêtes, et ce sont des enfants. Vienne la puberté, à la place du vieux monsieur qui s’assied sur une chaise, boit un verre de Champagne et fume un cigare, vous n’aurez plus qu’un animal féroce et stupide : chez les grands singes, l’intelligence ne dépasse jamais la période de l’enfance.

Un fait, qui se vérifie toujours, prouve bien que l’intelligence est beaucoup plus fréquente chez les enfants que chez les hommes ; c’est ceci que, très souvent, au collège, îe futur grand homme ne se distingue pas bien nettement des cinq ou six enfants qui tiennent la tête de leur classe. Il n’est pas toujours le premier, ni le second. Il brille dans un ordre d’études très différent de celui où il doit s’illustrer. Pasteur, au collège, n’estimait que la littérature ; il fît une tragédie en vers. Il arrive même que le génie futur soit un élève non pas médiocre, mais fantasque et qu’il se fasse mésestimer des professeurs. Une réunion d’adolescents dans un lycée de Paris forme une masse prodigieuse d’intelli-