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L’auteur de ce livre dont le titre est un aveu. Amoureux d’art, est aussi l’auteur du Roman de la chair. C’est en somme un sensuel, et de ceux qui ne séparent pas le plaisir de la beauté, de ceux pour qui, selon le mot de Stendhal, la beauté est une promesse de bonheur. Il est même assez probable que c’est par la sensualité qu’il est arrivé à l’art, car l’amour de l’art est une conquête et non un don naturel. Nous aurions donc en Jean Dolent un platonicien ingénu, qui a suivi sans y songer les conseils de Diotime. Mais arrivé au point où l’on peut séparer les deux idées de beauté et de plaisir, s’il les a séparées, ce ne fut qu’avec l’intention de les rejoindre et de les maintenir à l’occasion jalousement unies. On lit cela dans les phrases courtes et discrètes de ce trop petit livre. Une femme se donna le contentement de les glaner et de les assembler en une gerbe des plus agréables ; le choix est bon, puisqu’il est suffisant pour donner une idée de cet écrivain d’une si ingénieuse sincérité et, aujourd’hui comme hier, de la plus fraîche jeunesse d’esprit, de la plus fine intelligence.

1900.