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L’ENFANCE D’UN GRAND ÉCRIVAIN

On vient de publier un livre plein de renseignements et d’anecdotes sur l’enfance de M. Renan[1] C’est une occasion pour parler un peu de Renan, encore une fois, et surtout pour risquer quelques observations sur l’intelligence chez les enfants. Presque tous les animaux supérieurs sont plus intelligents pendant leur jeunesse. Le signe qu’ils en donnent est leur amour du jeu, c’est-à-dire de l’exercice désintéressé. L’intelligence est désintéressée. Elle trouve son but dans la manifestation même de son activité ; ce n’est que par surcroît et comme par accident qu’elle devient pratique. Mais on peut dire aussi que plus un acte est désintéressé et plus il peut approcher de la perfection : il est donc d’autant plus pratique qu’il est plus désintéressé. Il l’est par sur-

  1. René d’Ys, Ernest Renan en Bretagne, d’après des documents nouveaux. Préface de Jules Claretie (Emile-Paul, éditeur).