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beaux vers. Cette poésie contient l'aveu d’un grand amour, d’une grande souffrance et d’une grande désillusion. Abordons avec la Muse saphique dans l'île des Sirènes, nous nous apercevrons qu’elles ne chantent pas pour attirer le désir des hommes, mais pour se charmer entre elles. Elles entrelacent leurs bras et leurs rires, elles mêlent leurs lèvres et leurs aveux, et font la nique au génie de l’espèce. Pourtant, ces amours féminines ont, dans leurs effusions charnelles et sentimentales, la même gravité que les autres, et plus de grâce ; ce sont les mêmes serments d’éternité, les mêmes joies, les mêmes regrets, les mêmes larmes, les mêmes douleurs.

En réalité, dans ce couple d’une même féminité apparente, il peut y avoir une réelle antinomie sexuelle. Il n’y a pas de perversion de l’instinct génital, mais les êtres sont attirés vers ce qui les complémente, et toutes les amours