Page:Gourmont - Muses d’aujourd’hui, 1910, 3e éd.djvu/114

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
98
muses d’aujourd’hui

Ce bonheur de souffrir, c’est le bonheur des saints et des poètes. Cette plaie divine qui s’épanouit comme une rose, c’est la poésie. Quelle joie orgueilleuse de comprendre qu’on est bien seul enfermé avec sa souffrance :

Mon cœur est lourd comme un caillou,
Le vent souffle on ne sait d’où
Piquant comme un buisson de houx.

La philosophie qui se dégage de cette poésie, c’est l’amour de la vie. Ces derniers vers de Par l'Amour la résument :

Aimons tout de la vie, adorons jusqu’aux larmes
L’amour mystérieux ;
Obéissons au rite où le désir s’acharne
Comme au geste d’un dieu.

Ne soyons pas celui qui recule et se cache,
Et, d’avance vaincu,
Craint d’aimer, de souffrir, de créer : c’est un lâche,
Il n’aura point vécu !

Les Pastorales, le dernier recueil de Marie