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LA BONNE PLUIE



Un jour qu’ils chevauchaient à travers le désert Lybique en proie à la chaleur, à la soif et au vertige qu’elle amène, Flaubert tout à coup se mit à dire à Maxime du Camp : « Te souviens-tu de ces exquises glaces au citron de chez Tortoni ? » Du Camp, exaspéré, piqua des deux et bouda toute la journée. J’ai peur que le titre de cette note n’obtienne un résultat analogue et qu’on ne m’accuse de je ne sais quel sadisme. La bonne pluie, quand la reverrons-nous ? Quand donc entendrons-nous s’écraser sur le pavé ses larges gouttes ? Si longue que doit être son absence, elle reviendra. Il y a des pays où elle ne revient jamais, où elle n’est jamais venue, des pays habités, riches, où il y a des villes. Comment se figurer une telle vie ? Il y en a d’autres, au contraire où il pleut continuement, sans un moment de répit, toujours, toujours. Il y a une île dans ces conditions près des Auckland, au sud de l’Australie. C’est trop, mais si elle était à notre portée, je crois que nous