aux plus justes et aux plus belles métaphores antérieures, celles qu’il crée lui-même, même maladroites, même informes ; M. de Régnier ne dédaigne pas les métaphores antérieures, mais il les refaçonne et se les approprie en modifiant leur entourage, en leur imposant des voisinages nouveaux, des significations encore inconnues ; si parmi ces images retravaillées il s’en trouve quelqu’une de matière vierge, l’impression que donnera une telle poésie n’en sera pas moins tout à fait originale. En œuvrant ainsi, on échappe au bizarre et à l’obscur ; le lecteur n’est pas brusquement jeté dans une forêt dédalienne ; il retrouve son chemin, et sa joie de cueillir des fleurs nouvelles se double de la joie de cueillir des fleurs familières.
Le temps triste a fleuri ses heures en fleurs mortes,
L’An qui passe a jauni ses jours en feuilles sèches.
L’Aube pâle s’est vue à des eaux mornes
Et les faces du soir ont saigné sous les flèches
Du vent mystérieux qui rit et qui sanglote.
Une telle poésie a certainement de l’allure.
M. de Régnier sait dire en vers tout ce qu’il veut, sa subtilité est infinie ; il note d’indéfinissables nuances de rêve, d’imperceptibles appari-