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d’une fleur, l’attitude d’une fillette, la grâce d’une madone ou la froide et presque dure pureté de Catherine de Gênes, il nous séduit à coup sûr par cette préciosité même que d’aucuns, gauchement, lui reprochent. Cette préciosité est rigoureusement personnelle ; à l’écart des groupes, aussi loin de M. Huysmans que de M. Mallarmé, l’auteur de Tout Bas œuvre, dirait-on, dans une cellule, une cellule idéale qu’il emporte en voyage, et là, debout, souvent à genoux, il épanche ses poèmes, ses prières, selon des phrases d’une musicalité unique d’orgue byzantin. Phrases moins que vibrations, vibrations si spéciales que peu d’âmes s’y trouvent d’accord. Musique de plain-chant grégorien, tel qu’on l’écoute en une somptueuse église flamande, avec de soudaines fugues de prière exaltée qui planent sur les lignes hautes, se jettent vers les voûtes peintes, avivent les vieux vitraux, illuminent d’amour les chemins de la Croix assombris. Le moine mystique, le vrai moine, le Fra Angelico et un peu le Bonaventure, revit davantage le long des pages de Presque, de chatoyante spiritualité, qu’en toute la littérature pseudo-mystique de notre temps.