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se demander si Lautréamont, n’est pas un ironiste supérieur[1], un homme engagé par un mépris précoce pour les hommes à feindre une folie dont l’incohérence est plus sage et plus belle que la raison moyenne. Il y a la folie de l’orgueil ; il y a le délire de la médiocrité. Que de pages pondérées, honnêtes, de bonne et claire littérature, je donnerais pour celle-ci, pour ces pelletées de mots et de phrases sous lesquelles il semble avoir voulu enterrer la raison elle-même ! c’est tiré des singulières Poésies :

« Les perturbations, les anxiétés, les dépravations, la mort, les exceptions dans l’ordre physique ou moral, l’esprit de négation, les abrutissements, les hallucinations servies par la volonté, les tourments, la destruction, les renversements, les larmes, les insatiabilités, les asservissements, les imaginations creusantes, les romans, ce qui est inattendu, ce qu’il ne faut pas faire, les singularités chimiques du vautour

  1. Voici un exemple évident d’ironie : « Toi, jeune homme, ne te désespère point, car tu as un ami dans le vampire, malgré ton opinion contraire. En comptant l’acarus sarcopte qui produit la gale, tu auras deux amis. »