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LA DISSOCIATION DES IDÉES


Il y a deux manières de penser : ou accepter telles qu’elles sont en usage les idées et les associations d’idées, ou se livrer, pour son compte personnel, à de nouvelles associations et, ce qui est plus rare, à d’originales dissociations d’idées. L’intelligence capable de tels efforts est, plus ou moins, selon le degré, et selon l’abondance et la variété de ses autres dons, une intelligence créatrice. Il s’agit ou d’imaginer des rapports nouveaux entre les vieilles idées, les vieilles images, ou de séparer les vieilles idées, les vieilles images unies par la tradition, de les considérer une à une, quitte à les remarier et à ordonner une infinité de couples nouveaux qu’une nouvelle opération désunira encore, jusqu’à la formation toujours équivoque et fragile de nouveaux liens. Dans le domaine des faits et de l’expérience ces opérations se trouveraient limitées par la résistance de la matière et l’intolérance des lois physiques ; dans le domaine purement intellec-