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ou ramenés aux idées religieuses, qui n’avaient ni le désir, ni la crainte, ni l’espoir de ce revirement. Dans une conversion, la volonté ne peut agir qu’après un long travail du subconscient et lorsque tous les éléments de la conviction nouvelle ont été secrètement rassemblés et combinés. Cette force nouvelle où le converti s’appuie et dont il ignore l’origine, c’est ce que la théologie appelle la grâce ; la grâce est le résultat d’un labeur subconscient : la grâce est subconsciente.

Comme Hartmann, mais par instinct et non plus par préconception philosophique, Alfred de Vigny se fiait au subconscient du soin de mûrir ses idées ; mûres, il les retrouvait ; elles venaient d’elles-mêmes s’offrir, riches de toutes leurs conséquences. On peut supposer que, comme chez Goethe, c’était là un subconscient à lointaine échéance, du papier long, très long, car M. de Vigny laissa entre telles de ses oeuvres d’inhabituels intervalles. Il est très probable que, s’il y a des subconscients inactifs, il en est d’autres qui, après une période active, cessent tout à coup de travailler, soit qu’une usure précoce, soit qu’une modification de rapports ait eu lieu dans les cellules cérébrales. Racine offre l’exemple singulier d’un silence de vingt ans coupé juste au milieu par deux œuvres qui n’ont qu’une res-