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moire. Cette rumination, toute physiologique, peut suffire à modifier des croyances ou des convictions ; Hartmann a constaté qu’une idée ennemie, d’abord écartée, s’était au bout de quelque temps substituée en lui à l’idée habituelle qu’il avait d’un homme ou d’un fait. « Après des jours, des semaines ou des mois, si on a l’envie ou l’occasion d’exprimer son opinion sur le même sujet, on découvre, à son grand étonnement, qu’on a subi une véritable révolution mentale, que les anciennes opinions, dont on se considérait jusque-là comme réellement convaincu, ont été complètement abandonnées et que les idées nouvelles se sont tout à fait implantées à leur place. Ce processus inconscient de digestion et d’assimilation mentale, j’en ai souvent fait sur moi-même l’expérience ; et d’instinct, je me suis toujours gardé d’en troubler le cours par une réflexion prématurée, toutes les fois qu’il se produisait en moi à propos de questions importantes, qui intéressaient mes conceptions sur le monde et sur l’esprit[1] ». Cette observation pourrait être appliquée au phénomène si intéressant de la conversion. Il n’est pas douteux que des gens se sont un jour sentis amenés

  1. Le subconscient, p. 24.