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ce jour, ne m’a pas quitté, et vivant avec cette idée, je la reprenais en détail et j’en composais tour à tour les morceaux qui dans le moment m’intéressaient davantage ; de telle sorte que, quand cet intérêt m’a fait défaut, il en est résulté des lacunes, comme dans la seconde partie. La difficulté était là d’obtenir par force de volonté, ce qui ne s’obtient, à vrai dire, que par acte spontané de la nature ». Il arrive aussi, tout au contraire, qu’une oeuvre antérieurement conçue, et dont on repousse l’exécution, finisse par s’imposer à la volonté. Il semble alors que le subconscient déborde et submerge la conscience ; il dicte ce que l’on n’écrit qu’avec répugnance. C’est l’obsession que rien ne décourage et qui triomphe même des paresses les plus nonchalentes, des dégoûts les plus violents. Ensuite, on éprouve fréquemment, le travail accompli, une sorte de satisfaction, analogue à la satisfaction morale. L’idée du devoir qui, mal comprise, fait tant de ravages dans les consciences craintives, est sans doute une élaboration du subconscient : l’obsession est peut-être la force qui pousse au sacrifice, comme elle est celle qui pousse au suicide.

Schopenhauer comparait à la rumination le travail obscur et continu du subconscient au milieu des perceptions prisonnières dans la mé-