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des accords fortuits entre tels sons et tels idées ; il y a frémir, frayeur, froid, frileux, frisson. Sans doute, mais il y a aussi : frein, frère, frêle, frêne, fret, frime et vingt autres sonorités analogues pourvues chacune d’un sens très différent.

M. Albalat est plus heureux dans le reste des deux chapitres où il traite successivement de l’harmonie des mots et de l’harmonie des phrases ; il appelle avec raison le style des Goncourt, un style désécrit ; cela est bien plus frappant encore s’il s’agit de M. Loti. Il n’y a plus de phrases ; les pages sont un fouillis d’incidentes. L’arbre a été jeté par terre, ses branches taillées ; il n’y a plus qu’à en faire des fagots.

A partir de la neuvième leçon, l’Art d’écrire devient didactique encore davantage, et voici l’Invention, la Disposition et l’Élocution. Comment M. Albalat parvient-il à superposer ces trois moments, qui n’en font qu’un, de l’œuvre littéraire, je ne saurais l’exprimer sans beaucoup de tourment. L’art de développer un sujet m’a été refusé par la Providence ; je m’en remets de ce soin à l’inconscient, et je ne sais pas davantage comment on invente ; je crois qu’on invente surtout, au rebours de Newton, en n’y pensant jamais ; et quant à l’élocution, je ne me fierais qu’a-